Appel à communications : Journée d’étude "La fin d’un modèle ? Les répercussions du choc Trump en Asie-Pacifique"


Appel à communications

 

Journée d’étude coorganisée par l’EA CREW/ GIS Asie (université Sorbonne Nouvelle),
l’UR TransCrit (université Paris 8 – Vincennes – Saint Denis),
et l’UR Religion, Culture et Société (Institut catholique de Paris),
avec le soutien de l’OPEXAM (IRSEM)

 

21 novembre 2025

 

La fin d’un modèle ?
Les répercussions du choc Trump en Asie-Pacifique

 

Depuis le 20 janvier 2025, le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche s’est caractérisé d’emblée par une volonté de rupture tous azimuts de la part de la nouvelle administration, non seulement dans ses relations extérieures, mais aussi sur le plan intérieur. En effet, à un an de la célébration du 250e anniversaire de la Déclaration d’indépendance du pays, l’administration Trump semble prendre un virage illibéral[i] et remettre en question le modèle de société associant démocratie libérale et libre-échange économique, dont les Etats-Unis se sont faits les hérauts depuis 1776.

La volonté de rupture est tout aussi nette au niveau de leur politique extérieure avec la remise en cause du système international dont Washington a pourtant été le principal architecte après la Seconde Guerre mondiale. Rejet du multilatéralisme, remise en question des alliances traditionnelles, retrait total ou partiel de certaines organisations internationales, ambitions expansionnistes, guerre commerciale et protectionnisme économique, politique étrangère transactionnelle : le choc Trump provoque des bouleversements profonds qui obligent les autres pays – qu’ils aient été considérés jusqu’alors comme des partenaires ou comme des adversaires – à repenser leur stratégie dans un ordre international dont la recomposition dépendra aussi de leur réaction face à cette offensive trumpienne[ii]. La question se pose de façon particulièrement aiguë dans la région Asie-Pacifique, qui représente 60 % du PIB mondial et 66 % de la croissance mondiale[iii].

Cette journée d’étude vise donc à analyser les répercussions du choc Trump en Asie-Pacifique, puisque l’impact de ces bouleversements et les réactions des pays de cette région auront des retombées sur l’ensemble du monde.

Voici une liste de sujets et d’angles d’analyse envisagés pour cette journée d’étude.

Sur le plan de la politique intérieure :

  • Quel est l’impact de la dérive illibérale étatsunienne sur les pays qui ont fondé leur politique et leur diplomatie sur la défense du modèle démocratique libéral (par exemple Taïwan) et dont la sécurité dépend largement des États-Unis (notamment le Japon et la Corée du Sud) ?
  • Comment est perçu ce virage illibéral étatsunien par les régimes autoritaires (Chine, Corée du Nord, etc.) ? Ébranle-t-il le socle démocratique de certains pays en Asie-Pacifique ? Contribue-t-il à un basculement vers l’autoritarisme comme par exemple aux Philippines ?

Sur la remise en question du modèle libre-échange :

  • Le retour de Trump à la Maison-Blanche conduit-il à une recomposition des échanges et des partenariats en Asie-Pacifique ? Quel est son impact sur les « nouvelles routes de la soie » lancées par Pékin en 2013 (rebaptisées Belt & Road Initiative en 2017), sur la volonté chinoise de dédollariser l’économie, sur la place des traités multilatéraux de libre-échange comme l’Accord de partenariat transpacifique ou de forums comme l’APEC (Coopération économique pour l’Asie-Pacifique) ?
  • Quels sont les enjeux économiques et géoéconomiques – et, partant, politiques et diplomatiques – de la remise en cause par Washington du système de libre-échange ?

Sur le plan des relations internationales :

  • Assiste-t-on à un délitement ou à un renforcement des relations entre les pays en Asie-Pacifique ? Ce choc Trump provoque-t-il un mouvement centrifuge ou centripète dans la région ?
  • Le désengagement étatsunien en faveur d’une politique opportuniste et transactionnelle représente-t-il une aubaine pour la Chine de Xi Jinping ? L’Europe elle-même envisagerait-elle sa propre « stratégie du pivot » vers l’Asie ?

 Sur les questions de sécurité :

  • Quel est le poids des questions de sécurité dans les pays jusqu’alors alliés des États-Unis ? La présence de bases militaires étatsuniennes est-elle remise en question dans certains pays de l’Asie-Pacifique ? Comment les jeux d’alliance, pilier de la stratégie Biden dans la région, se recomposent-ils ?
  • Face à cette érosion du modèle démocratique libéral que les États-Unis incarnaient jusqu’à présent, comment la puissance militaire étatsunienne est-elle perçue par les pays en Asie-Pacifique ? Est-elle envisagée par l’administration Trump comme un moyen de défendre les intérêts nationaux des États-Unis dans la région ?

Ces exemples ne sont pas exhaustifs.

Les propositions sont à envoyer d’ici le 13 juin 2025 aux trois coorganisatrices Iside Costantini (iside.costantini@sorbonne-nouvelle.fr), Juliette Bourdin (juliette.bourdin@univ-paris8.fr) et Caixia Tan (c.tan@icp.fr).

Les communicant·e·s recevront une réponse d’ici le 30 juin 2025.

 

[i] Dans les années 1990, faisant suite à l’effondrement du bloc soviétique et à la transition démocratique de la plupart des anciens pays du bloc, Fareed Zakaria, journaliste et politologue américain, définit la « démocratie illibérale » comme « une démocratie sans libéralisme constitutionnel qui produit des régimes centralisés, l’érosion de la liberté, des compétitions ethniques, des conflits et la guerre » (p. 42-43). Il concède que la démocratie et le libéralisme politique ont souvent existé l’un sans l’autre, ainsi un gouvernement peut être élu démocratiquement tout en ignorant les limites constitutionnelles à son pouvoir et ne protégeant plus les droits et libertés des citoyens. Voir Fareed Zakaria, « The Rise of Illiberal Democracy », Foreign Affairs, Vol. 76, No. 6 (novembre-décembre 1997), p. 22-43. https://doi.org/10.2307/20048274. Sur la notion d’illibéralisme, voir également Didier Mineur, « Qu’est-ce que la démocratie illibérale ? », Cités, no 79, ? 2019, p. 105-117. https://doi.org/10.3917/cite.079.0105. La question de l’illibéralisme et de l’autoritarisme a fait l’objet de nombreuses analyses ces dernières années, dont voici quelques exemples : Steven Levitsky & Daniel Ziblatt, How Democracies Die (Crown, 2018) ; Ruth Ben-Giat, Strongmen : Mussolini to the Present (Norton, 2020) ; Federico Finchelstein, The Wannabe Fascists : A Guide to Understanding the Greatest Threat to Democracy (University of California Press, 2024) ; Erika Frantz, Andrea Kendall-Taylor & Joe Wright, The Origins of Elected Strongmen : How Personalist Parties Destroy Democracy from Within (Oxford University Press, 2024) ; Aleksandar Matovski, Popular Dictatorships : Crises, Mass Opinion, and the Rise of Electoral Authoritarianism (Cambridge University Press, 2021) ; Sergei Guriev & Daniel Treisman, Spin Dictators : The Changing Face of Tyranny in the 21st Century (Princeton University Press, 2022) ; Anne Applebaum, Autocracy Inc. : The Dictators Who Want to Change the World (Doubleday, 2024).

[ii] Ce choc Trump oblige également les observateurs à (re)penser leurs analyses et provoque un débat nourri, comme on le constate par exemple dans la revue Foreign Affairs.

[iii] Nous empruntons la définition de l’Asie-Pacifique adoptée par Sophie Boisseau du Rocher et Christian Lechervy, qui comporte les 17 pays suivants : Brunei, Birmanie, Cambodge, Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Indonésie, Japon, Malaisie, Mongolie, Laos, Philippines, Singapour, Taïwan, Thaïlande, Timor-Leste, Vietnam. Sophie Boisseau du Rocher et Christian Lechervy, L’Asie-Pacifique, nouveau centre du monde, Paris, Odile Jacob, 2025, p. 10-12.