Séminaire LAPS 2010-2011


Seminaire LAPS 2010-2011

DateIntervenant(s)Titre
27 mai 2011 Takeki Kamiyama (LPP, Paris 3) « L’enseignement de la prononciation des langues étrangères : la communication et le rôle de la conscience ».
20 mai 2011 Amandine Michelas (Laboratoire Parole et Langage, Aix) « Rôle du syntagme intermédiaire dans le traitement syntaxique des énoncés parlés en français ».
11 mars 2011 Géraldine Vercherand (CLILLAC-ARP, Paris 7) « La voix chuchotée ».
25 février 2011 Kizzi Edensor (Laboratoire Parole et Langage, Aix) « Les variétés de l’anglais ».
14 janvier 2011 Céline Horgues (CLILLAC-ARP, Paris 7) « Prosodie de l’accent français en anglais et perception par des auditeurs anglophones ».
7 janvier 2011 Anne Tortel (LAPS, Paris 8) « Présentation du boîtier PERCEVAL pour montages expérimentaux ».
26 novembre 2010 Erwan Pépiot (LAPS, Paris 8) « Voix de femmes, voix d’hommes : sur l’identification du genre par la voix chez des auditeurs anglophones et francophones ».
 
 

Résumés

 

- Takeki Kamiyama (LPP, Paris 3) « L’enseignement de la prononciation des langues étrangères : la communication et le rôle de la conscience ».?

 

La prononciation (le segmental -consonnes et voyelles- et la prosodie -rythme, accentuation et intonation-) est une des composantes de l’enseignement guidé de langues étrangères, mais la place et l’importance accordées à cette composante ont varié et varient encore en fonction des courants méthodologiques adoptés. Alors que la méthode directe (la « méthode phonétique » en particulier) et l’approche structurale (notamment la méthode SGAV : Structuro-Globale Audio-Visuelle) accordaient une importance considérable à la prononciation (Champagne-Muzar et Bourdages 1998), une disparition quasi-totale de la composante phonétique a été observée à l’arrivée de l’approche communicative (Galazzi-Matasci et Pedoya 1983). Cela signifie que la prononciation est enseignée implicitement, alors que le repérage (noticing) conscient serait une condition nécessaire pour que l’apprentissage ait lieu (Schmidt 1990). Par ailleurs, la proposition de "Focus on form" (concentration d’attention sur la forme : Doughty et Williams 1998) met en cause la primauté de la fluidité de la communication (fluency) en faveur de la précision de la forme (accuracy), pour que cette dernière puisse être traitée dans des activités dont la visée primordiale porte sur la communication. En ce qui concerne la prononciation, Celce-Murcia et al. (1996) soulignent l’importance de l’intégration de la composante phonétique dans des activités communicatives. Il existe également d’autres approches non-traditionnelles, dont l’approche synthétique ou globale (holistic) de Laroy (1995). Face à la diversité des exercices et des activités, traditionnels et plus modernes, il semble important de considérer leur progression (Lauret 2007). Il serait particulièrement efficace de proposer un entraînement intensif de la prononciation au tout début de l’apprentissage à l’exclusion du code écrit (ibid.), en prenant en compte les résultats de l’expérience de Neufeld (1979), dans laquelle des apprenants adultes ont montré d’excellentes compétences d’imitation phonétique de langues inconnues à l’issue d’un entraînement phonétique de 18 heures.

 

Références

  • Celce-Murcia, Marianne, Donna M. Brinton & Janet Goodwin (1996). Teaching Pronunciation : a Reference for Teachers of English to Speakers of Other Languages. Cambridge : Cambridge University Press.
  • Champagne-Muzar, Cécile & Bourdages, Johanne S. (1998). Le point sur la phonétique. Paris : Clé Internationale.
  • Doughty, Catherine & Jessica Williams (1998). Focus on Form in Classroom Second Language Acquisition (The Cambridge Applied Linguistics Series). New York : Cambridge University Press.
  • Galazzi-Matasci, Enrica & Elisabeth Pedoya. (1983). Et la pédagogie de la prononciation ? Le français dans le monde 180, 39-44.
  • Laroy, Clement (1995). Pronunciation. Oxford : Oxford University Press.
  • Lauret, Bertrand (2007). Enseigner la prononciation du français : questions et outils. Paris : Hachette.
  • Neufeld, Gerald. G. (1979). Vers une théorie de la capacité d’apprentissage linguistique. Encrages, numéro spécial de Linguistique appliquée, Université de Paris VIII, 9-15.
  • Schmidt, Richard W. (1990). The role of consciousness in second language learning. Applied Linguistics 11, 129-158

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- Amandine Michelas (Laboratoire Parole et Langage, Aix) « Rôle du syntagme intermédiaire dans le traitement syntaxique des énoncés parlés en français ».

 

La plupart des modèles de la structure prosodique du français s’accordent sur l’existence de deux niveaux de structure : le syntagme accentuel (AP) et le syntagme intonatif. De récentes études ont apporté des preuves de l’existence d’un niveau additionnel de structure situé entre ces deux niveaux : le syntagme intermédiaire (ip). La frontière droite de l’ip est marquée par un allongement pré-frontière ainsi qu’un accent de syntagme responsable du retour à la ligne de référence du registre.

 

Dans les deux études que nous présenterons, nous avons testé l’influence de la frontière droite du syntagme intermédiaire dans le traitement syntaxique de la parole. Les résultats de deux tâches de complétion de phrases à choix forcé ont montré que les frontières droites du syntagme accentuel et du syntagme intermédiaire sont utilisées très tôt dans le processus de traitement syntaxique. Les indices phonétiques et phonologiques présents à ces frontières permettent aux auditeurs du français de construire des attentes sur la structure syntaxique des énoncés perçus. Une analyse séparée des différents types d’indices acoustiques a également montré qu’en l’absence de marquage tonal les indices de durée suffisent à marquer la frontière d’AP alors qu’un marquage conjoint par les indices mélodiques et l’allongement pré-frontière semble nécessaire pour percevoir et utiliser la frontière droite d’ip.

 

Mots clefs : découpage prosodique, syntagme accentuel, syntagme intermédiaire, intonation, traitement syntaxique, phonologie de laboratoire, français.

 

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- Géraldine Vercherand (CLILLAC-ARP, Paris 7) « La voix chuchotée ».

 
 

- Kizzi Edensor (Laboratoire Parole et Langage, Aix) « Les variétés de l’anglais ».

 

Il existe peu de recherches sur la perception et la compréhension des accents régionaux britanniques. Pourtant la variation linguistique due aux différences régionales et ethniques est une propriété importante de la langue parlée. Des études empiriques sont nécessaires pour donner des indices sur leur traitement. Les apprenants d’anglais qui se rendent au Royaume-Uni sont inévitablement confrontés à des variétés autres que la variété standard (Received Pronunciation) qu’ils ont généralement apprise dans leur pays. Les quelques études qui ont essayé de mesurer l’intelligibilité de la RP ainsi que d’autres variétés d’anglais ont conclu que l’accent RP n’était pas le plus facile à comprendre (Hanson et Ikeno, 2007, Fraser Gupta 2005). L’étude de Hanson et Ikeno (2007) a en effet montré que l’accent de Cardiff était plus facile à comprendre que l’accent proche de la RP (Cambridge). Cependant, les auteurs n’avaient utilisé que trois variétés régionales du corpus IViE. Nous voulions connaître l’intelligibilité des neuf accents présents dans ce corpus afin d’apporter une réponse plus complète que celle avancée par Hanson et Ikeno.

 

L’objectif principal de ce travail est donc d’examiner les capacités de perception et de compréhension des francophones lorsqu’ils sont confrontés aux différentes variétés régionales de l’anglais britannique. Pour ce faire, nous avons mené quatre expériences sous forme de tests de perception (expériences d’identification des accents et de compréhension). Les enregistrements que nous avons choisis, extraits du corpus IViE, incluent neuf accents : Cambridge, Londres (ascendance jamaïcaine), Liverpool, Leeds, Bradford (bilingues anglais-Panjabi), Cardiff (bilingues anglais-gallois), Newcastle, Belfast et Malahide (Dublin). L’expérience d’identification des accents par région a démontré que les apprenants francophones ont plus de facilités à catégoriser les accents aux sonorités non-natives (jamaïcain et panjabi) que les autres variétés. La plupart des erreurs de compréhension et de perception concernaient la réduction de mots qui est commune à tous les accents et présente dans la parole continue. Toutefois, les traits les plus caractéristiques de ces accents ont été également difficiles à traiter pour les sujets francophones. Ce travail souligne l’importance de l’attention qu’il faut prêter à ce type d’erreurs afin d’en faciliter la compréhension et ce, dans une perspective d’application didactique. Le fait que certaines variétés peuvent affecter la compréhension de la langue a également des implications pédagogiques. Il est important d’aborder et de présenter ces variétés pour préparer les étudiants à se doter des mécanismes perceptifs nécessaires pour y faire face.

 

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- Céline Horgues (CLILLAC-ARP, Paris 7) « Prosodie de l’accent français en anglais et perception par des auditeurs anglophones ».

 
 

- Anne Tortel (LAPS, Paris 8) « Présentation du boîtier PERCEVAL pour montages expérimentaux ».

 
 

- Erwan Pépiot (LAPS, Paris 8) « Voix de femmes, voix d’hommes : sur l’identification du genre par la voix chez des auditeurs anglophones et francophones ».

 

La fréquence fondamentale moyenne est communément considérée comme la principale différence entre les voix d’hommes et de femmes : elle se situerait respectivement aux alentours des 120 Hz et des 240 Hz (Vaissière, 2006). Cependant, de nombreuses études ont mis en évidence d’autres différences : le timbre (Coleman, 1976), l’intonation (Olsen, 1981), c’est-à-dire les variations de la courbe de F0 dans le temps, ou encore la position de la zone de bruit des fricatives sourdes (Schwartz, 1968). Les rôles respectifs joués par ces différents indices acoustiques dans l’identification du genre par la voix sont encore relativement peu établis et font l’objet de débats (voir notamment Pausewang Gelfer & Mikos, 2005, et Arnold, 2008). Pour mon mémoire de recherche de Master 2, j’ai décidé d’étudier le rôle joué par la fréquence fondamentale moyenne et l’intonation, ainsi que l’influence du facteur langue, un paramètre bien souvent négligé. Il m’a donc fallu mettre au point une expérience d’identification du genre par la voix qui permette de tester tous ces paramètres. C’est cette expérience que je présenterai à l’occasion de ce séminaire LAPS.

 

Après avoir enregistré des locuteurs de deux langues différentes (anglais américain et français standard) lisant des phrases isolées, différents paramètres acoustiques ont ensuite été modifiés par resynthèse. Quatre séries de huit stimuli ont ainsi été créées : voix naturelles, F0 moyens resynthétisés à 169 Hz, courbes de F0 aplaties à 169 Hz, et F0 moyens des hommes et des femmes permutés (209 Hz et 129 Hz). Ces stimuli ont été diffusés à deux groupes d’auditeurs, anglophones et francophones, dans le cadre de quatre sessions espacées chacune d’une semaine. La tâche des participants a été d’identifier pour chaque stimulus le genre du locuteur (voix d’homme / voix de femme) et d’accompagner leur réponse d’un degré de certitude. Au total, plus de mille jugements ont ainsi été émis, et ont fait l’objet de diverses analyses statistiques.

 

Les auditeurs anglophones ont été plus sensibles que les francophones aux variations de la fréquence fondamentale moyenne. En revanche, l’aplatissement de la courbe de F0 n’a pas eu d’incidence significative sur leurs jugements, contrairement aux auditeurs francophones, pour qui l’intonation semble bien jouer un rôle. De plus, ce ne sont pas les mêmes voix qui ont posé problème aux anglophones et aux francophones. Ces résultats permettent de conclure que la langue maternelle influence grandement les stratégies adoptées par les auditeurs pour reconnaître le genre des locuteurs à leur voix.

 

Références bibliographiques :

  • ARNOLD, A. (2008). La prosodie comme espace d’émergence du genre (119 p.). Mémoire de Master 2 sous la direction de Lucas Greco et Jacqueline Vaissière. Université Paris III.
  • COLEMAN, R. O. (1976). A Comparison of the Contributions of Two Voice Quality Characteristics to the Perception of Maleness and Femaleness in the Voice. Journal of Speech and Hearing Research, 19, 168-180.
  • OLSEN, C.L. (1981). Sex differences in English intonation observed in female impersonation. Toronto Papers of the Speech and Voice Society, 2, 30-49.
  • PAUSEWANG GELFER, M. & MIKOS, V. (2005). The Relative Contributions of Speaking Fundamental Frequency and Formant Frequencies to Gender Identification Based on Isolated Vowels. Journal of Voice, 19(4), 544-554.
  • SCHWARTZ, M.F. (1968). Identification of speaker sex from isolated voiceless fricatives. Journal of the Acoustical Society of America, 43, 1178-1179.
  • VAISSIERE, J. (2006). La phonétique. Paris : Presses Universitaires de France.

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